Une supernova aurais permutée l’intérieur et la surface d’une étoile
Schéma de la composition chimique de l'étoile massive
Selon la théorie de la nucléosynthèse stellaire, une étoile massive, juste avant son explosion, est formée de couches d’éléments d’autant plus lourds que l’on se rapproche de son centre. L’analyse des restes de la supernova à l’origine de Cassiopée A montre… l’inverse. Étonnamment, la SN II a renversé le gradient chimique.
C’est à une conclusion surprenante que sont parvenus les astrophysiciens analysant dans le domaine des rayons X les restes de l’explosion d’une supernova SN II de la Voie lactée. Découverts d’abord sous forme d’une source radio dans la constellation de Cassiopée, les restes de cette supernova sont étudiés depuis quelques années à l’aide des télescopes Hubble et Chandra.
L’explosion de la supernova à l’origine de Cassiopée A est récente et a été visible sur Terre en 1667 dans la Voie lactée. Pourtant, elle n’a pas été mentionnée par les astronomes de l’époque, probablement parce qu’elle était cachée par d’épais nuages de poussières et de gaz.
En haut, un schéma de la composition chimique de l’étoile massive avec l’explosion ayant formé Cassiopée A. Sa structure en oignon montre que les atomes les plus lourds, le fer (Fe) et le silicium (Si), sont au centre de l’étoile, alors que l’hydrogène (H) et l’hélium (He) se trouvent à la surface. Sur la droite, les restes de la supernova à l’origine de Cassiopée A montrent une structure exactement inverse. On le voit grâce aux fausses couleurs associées aux noyaux présents dans les restes de la supernova et qui correspondent aux couleurs du schéma de gauche. © Nasa/CXC/M.Weiss ; X-ray : Nasa/CXC/GSFC/U. Hwang & J. Laming
L’astrophysique nucléaire qui s’est rapidement développée après la seconde guerre mondiale nous a permis de comprendre que l’étoile qui précédait cette supernova devait être au moins huit fois plus massive que le Soleil. C’est pourquoi des réactions thermonucléaires y ont produit tous les éléments plus lourds que l’hélium jusqu’au fer.
Toujours avec le même code de fausses couleurs que celles du schéma précédent, cette vidéo montre la composition chimique des couches des restes de la supernova à l’origine de Cassiopée A, vue en rayons X par Chandra. © Nasa/CXC/A. Hobart/YouTube :
La structure en oignon de Cassiopée A
L’étoile devait ainsi être constituée de couches concentriques formées d’éléments synthétisés successivement dans sa courte vie par fusion thermonucléaire des éléments les plus légers. Dernier né, le fer se trouvait donc au cœur de l’astre, entouré de couches d’oxygène et de carbone, puis de néon, de silicium et de magnésium, l’hélium puis l’hydrogène enveloppant le tout (voir le schéma ci-dessous).
Comme l’expliquent les chercheurs dans un article publié sur Arxiv, l’explosion de cette étoile a bouleversé radicalement cet ordre. On aurait pu croire que ce gradient chimique soit conservé dans les éjectas laissés par l’explosion. Les restes des couches d’hydrogène et d’hélium seraient alors aujourd’hui les plus éloignées de l’astre central, une étoile à neutrons. Mais c’est l’inverse que l’on observe ! Les couches de matière à plusieurs dizaines de millions de kelvins fonçant à travers l’espace à plus de 4.000 km/s révèlent que les noyaux de fer se trouvent dans la coquille de gaz la plus externe, entourant celles riches en noyaux de silicium, soufre et magnésium.
Clairement, des instabilités hydrodynamiques dans l’explosion ont en quelque sorte retourné l’étoile sur elle-même, renversant son gradient chimique. De même qu’il nous reste encore des choses à apprendre sur les supernovae SN Ia, puisque l’on pense maintenant qu’il est probable qu’elles sont le plus souvent des collisions de naines blanches, l’univers a certainement encore en réserve pour nous des surprises avec les SN II...
Source : futurascience
04-2012